Le spiritisme
« Le spiritisme et la théosophie ont participé à l’archéologie de la découverte de l’inconscient tel que Sigmund Freud l’a défini à partir de ‘La Science des rêves’. Au cours du XIXme siècle, en plein essor de la civilisation industrielle et du positivisme, un nouvel intérêt pour tout ce qui touche aux manifestations des esprits voit le jour. » Hypnos.
Le spiritisme connaît un renouveau au cours du XIXme siècle, deux causes principales semblent être à l’origine de cet engouement qui touche toutes les classes sociales :
« Les raisons de ce développement sont liées à la prolétarisation et l’exode rural, deux évènements socio-économiques majeurs de l’époque plongés dans l’effervescence de la révolution industrielle, en rupture avec leurs origines et leur patrimoine les membres de la classe ouvrière ressentent le besoin de renouer clandestinement des liens avec leurs ancêtres. » Peiry Lucienne.
Originaires des États-Unis, les premières « manifestations d’esprits frappeurs » ont lieu en 1847 et connaissent un essor fulgurant. Le spiritisme arrive en Europe dans les années 1852 et rencontre la même ferveur.
« La société du XIXme siècle s’enthousiasme pour cette possibilité de dialoguer avec les morts ou avec les entités abstraites. Des cercles spirites sont créés, des théoriciens comme Allan Kardec multiplient les ouvrages, créés des revues expliquant et codifiant les pratiques. Une abondante littérature popularise le personnage du médium, de la voyante, du fantôme et de la pratique des séances de table tournante. » Faupin Savine, in Hypnos.
Cherchant à communiquer avec les esprits, les séances de spiritisme peuvent prendre différentes formes : matérialisation, transe, ouija, les plus répandus étant la pratique des tables tournantes et celle de l’écriture et du dessin médiumniques. La pratique du dessin médiumnique est très répandue, plusieurs médiums sont célèbres pour leurs productions comme Hélène Smith, William Blake, Augustin Lepage dont le point commun est la rapidité d’exécution et la sensation que la main est animée d’un mouvement fiévreux, d’une impulsion :
« Augustin Lepage a été un des meilleurs médiums dessinateurs. Ouvrier mineur, (…) peignait sans hésitation et sans arrêt, ménageant ses gestes et ne retouchant jamais. Aucune vision d’ensemble ne préparait son travail. Le tableau se faisait détail par détail sous l’impulsion des ‘guides’ qui lui indiquaient jusqu’aux changements de couleurs. » Vinchon, 1950.
Les spirites n’hésitent pas à employer la photographie pour témoigner des phénomènes paranormaux, par ce procédé on cherche à rationaliser ces phénomènes. Par ces expressions photographiques et littéraires le mouvement a une volonté de hisser les recherches occultistes au niveau scientifique.
Le rôle des sciences
Face à cet engouement de phénomènes inexpliqués, des scientifiques particulièrement des psychiatres vont commencer à se pencher sur la question pour tenter de fournir une explication rationnelle à ces manifestations. Certains médecins assisteront à des séances de magnétisme, cherchant une cause à ces effets.
Le français Jean Martin Charcot, neuropsychiatre chef de service à la Salpêtrière réalisera des études sur l’hystérie au moyen de l’hypnose : « pensant, grâce à cette technique séparer les vrais malades, des simulateurs. » (Boulanger Christophe in Hypnos) D’autres psychiatres et psychologues sonderont l’occulte pour tenter d’atteindre « l’au-delà de la conscience ».
En 1889, le médecin et philosophe Pierre Janet écrit L’automatisme psychologique où il consacrera un chapitre à l’étude du spiritisme. En guise d’introduction Pierre Janet livre une définition intéressante de l’automatisme percevant deux sens : un premier déjà établi : « spontané qui se meut et ne pas provenir d’une impulsion extérieure ; une poupée mécanique qui marche seule sera dite automate, (…) et soit soumis à un déterminisme rigoureux, sans variations et sans caprices« . Il termine sa première constatation en objectant que l’activité humaine détient ces deux caractères.
Puis un second sens portant à controverse, qui sera l’objet de son étude : « une activité automatique est, pour quelques auteurs, non seulement une activité régulière et rigoureusement déterminée, mais encore une activité purement mécanique et absolument sans conscience. (…) En d’autres termes, il ne nous semble pas que, dans un être vivant, l’activité qui se manifeste au dehors par le mouvement puisse être séparée d’une certaine forme d’intelligence et de conscience qui l’accompagne au-dedans, et notre but est de démonter non seulement qu’il y a une activité humaine méritant le nom d’automatique, mais encore qu’il est légitime de l’appeler un automatisme psychologique. »
L’apport de la psychanalyse
Sigmund Freud ayant suivi les travaux de Charcot et ses disciples sur l’hystérie, se distance de leurs méthodes, préconisant la parole et la prise de conscience à l’hypnose. Procédés qui aboutiront vers 1904 au développement de la psychanalyse.
Freud est incontestablement celui qui a apporté le plus en matière d’avancée psychologique. Deux sujets essentiels et complémentaires, le rêve et l’inconscient vont être importants dans cette progression de l’automatisme. Le rêve étant ‘la voie royale de l’inconscient’, et l’automatisme l’outil principal de sa captation.
L’interprétation des rêves écrit en 1899 est une avancée fondamentale pour la médecine ; pour la première fois est tentée une approche scientifique du rêve.
La notion d’inconscient attestée pour la première fois en 1820 n’est pas inconnue : depuis longtemps il avait été observé que certains phénomènes échappaient à la conscience, cependant Freud va apporter une nouvelle conception. L’inconscient qu’introduit Freud n’est pas simplement ce qui ne relève pas de la conscience. Par inconscient, Freud entend à la fois un certain nombre de données, d’informations, de désirs tenus hors de la conscience, mais aussi l’ensemble des processus qui empêchent certaines données d’arriver à la conscience et permettent aux autres d’y accéder tel le refoulement. Freud pose alors l’inconscient comme origine de la plupart des actes conscients.
Carl Gustav Jung est le second découvreur de l’inconscient, il introduit le concept de la pensée d’inconscient collectif, les archétypes, l’anima. Après avoir travaillé conjointement, Jung et Freud prennent leurs distances, étant en désaccord sur plusieurs sujets. Le concept d’inconscient collectif de Jung est incompatible avec celui de Freud dont l’inconscient possède un caractère strictement individuel. Jung fondera alors la psychologie analytique.
Jung introduira la pratique du dessin thérapeutique dans ses séances, alliant alors analyse des rêves et dessins d’images intérieures, qui s’avéreront très utiles pour le traitement de certains malades :
« Dans ‘La Guérison psychologique’, C. G. Jung consacre une grande partie (…) à l’utilisation du dessin comme facteur de l’auto-évaluation de l’être. Un malade lui a dit à propos d’un de ces rêves : ‘voyez-vous si j’étais peintre j’en ferai un tableau’. » Vinchon, 1959.